Le 15 novembre 2023, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt condamnant un employeur pour manquement à son obligation de sécurité (Cass. soc., 15 nov. 2023, n°22-17.733).

Cet arrêt est rendu au visa de l’article L.4121-1 du code du travail, qui prévoit que l’employeur est tenu à une obligation de sécurité vis-à-vis de ses employées, et doit prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : des actions de prévention des risques professionnels ; des actions d'information et de formation ; la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ».

Rappel des faits et de la procédure

En l’espèce, un salarié, travaillant pour une Organisation Non Gouvernementale en Haïti en tant que responsable de programme éducation, contracte une maladie parasitaire intestinale, en 2012, durant sa mission, imputée à une consommation d’eau de ville non ou mal filtrée. Son état de santé le place d’abord en arrêt de travail puis nécessite un rapatriement. Quelques mois plus tard, il est jugé que son état de santé lui permet de reprendre le travail mais est finalement licencié, quelques temps, après sa reprise pour faute grave.

Le salarié a saisi la juridiction prud'homale en vue de l’obtention du paiement de plusieurs sommes à la suite de sa rupture de contrat, avançant ses mauvaises conditions de travail et d'hébergement, l’absence de mise à disposition d’un matériel conforme pour purifier l’eau, l’absence d’assistance après avoir contracté la maladie, et le refus de son employeur de lui organiser un rapatriement, imputant un manquement à l’obligation de sécurité de son employeur.

L’employeur se défend, arguant du fait que le salarié a été imprudent en consommant de l’eau de ville, imputant à son ancien salarié un manquement à son obligation de prudence.

Dans un arrêt d’octobre 2021, la Cour d’appel de Montpellier a rejeté la demande de dommages et intérêts de l’ancien salarié, au motif que le salarié n’a pas apporté de preuves démontrant qu’il a été contraint de boire de l’eau mal filtrée, qu’il est notoire que l’eau de ville en Haïti n’est pas potable et qu’il convient donc de boire de l’eau minérale en bouteille.

La Cour d’appel, considérant « que le salarié a manqué à cette obligation de prudence élémentaire », l’a en conséquence débouté de ses demandes.

Le salarié s’est pourvu en cassation

La Cour de Cassation a cassé et annulé la décision de la Cour d’Appel de Montpellier, sur le fondement du manquement à l'obligation de sécurité de l’employeur, et a condamné l’Organisation Non Gouvernementale au motif que :

« En statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'employeur avait pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé du salarié, et sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenait que l'association ne lui avait apporté aucune aide ni assistance lorsqu'il avait contracté cette maladie tropicale, faute de matériel conforme, l'avait laissé livré à lui-même malade, et n'avait pas voulu organiser un rapatriement sanitaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

 (Cass. soc., 15 nov. 2023, n°22-17.733).